Posted by on 12 juin 2023

De l’avis général, la compétition officielle était excellente. Et le palmarès est à la hauteur de cette qualité. La Palme d’or récompense « Anatomie d’une chute » de la Française Justine Triet et donne une conception vraiment nouvelle de la justice lorsqu’elle encourage la grave tendance de la « judiciarisation de l’intime » comme le constate la réalisatrice. À coups de vidéos et d’enregistrements privés et considérés comme pièces à conviction, l’interprétation des faits désigne une coupable, s’éloigne des réalités et donne le dernier mot aux experts bien éloignés de la sphère familiale. Heureusement, un enfant meurtri par la perte de son père devient patiemment le porteur du bon sens.
Le grand prix du Jury a récompensé « The zone of interest » de Jonathan Glazer. Un film glacial qui interroge sur la responsabilité de toute une famille, celle du commandant Höss du camp d’Auschwitz en 1943. Encore une oeuvre innovante par son décor et sa bande son, celui d’une maison attenante au camp d’où s’échappent toutes les clameurs et les bruits de la solution finale, sans qu’aucune image ne parvienne aux gens de la demeure, avec sa piscine, son jardin propret et son antisémitisme ravageur.
Le prix du Jury oecuménique revient au cinéaste allemand Wim Wenders pour « Perfect days ». À l’encontre des bruits et de la fureur des films déjà cités, celui-ci choisit le minimalisme pour raconter la vie quotidienne d’un employé aux toilettes publiques de Tokyo. Jour après jour, il se contente de son sort et s’émerveille de la beauté du monde à travers l’objectif de son appareil photo, ses rencontres et la contemplation du ciel. Ses propos font du bien et, sans se réclamer d’un culte particulier, sont riches de spiritualité. Le comédien Koji Yakusho a mérité son prix d’interprétation masculine au palmarès officiel, tant il transmet la joie d’être un petit parmi les hommes.
Et hors compétition, avant sa sortie en novembre, j’ai découvert le puissant biopic « L’Abbé Pierre, une vie de combats » de Frédéric Tellier. J’y reviendrai dans un prochain Lien.
Michel Rocher